Emile Bela

CE QU’UN ENTRETIEN D’EMBAUCHE M’A ENSEIGNE

Vendredi dernier, j’ai eu le privilège de diriger un panel d’entretien d’embauche. Voici trois situations que j’ai vécues et leçons que j’en tire:

1. Une candidate que j’ai appelée pour programmer son entretien. Pour confirmer son identité, voici notre conversation :

Moi: Bonjour Madame, s’il vous plaît est-ce bien vous Madame Xxxy (quoiqu’elle soit célibataire, sur le CV et moins âgée que moi)
Elle: (Sur un ton très agressif) Qui êtes-vous ? Vous m’appelez matin et vous me demandez qui je suis? Tchrrrrr
Moi: Madame Calmez-vous, je vous appelle de…
J’entends kpin kpin. Elle m’a raccroché au nez!
J’ai fais une petite prière pour elle avant de passer aux autres candidats sur la liste… Le Karma parfois nous mène et nous malmène.

Leçon: Contrôlons notre langage, notre relation avec l’autre. La politesse, ce n’est pas seulement envers ceux qu’on connaît mais aussi et surtout envers les inconnus. L’arrogance et l’orgueil précèdent la chute.

2. Une candidate venue à l’interview. Nous avons passé une demie heure pendant laquelle elle s’est très bien montrée. Un bon profil académique, l’assurance dans la voix, dans la gestuelle aussi. Une femme mariée (donc mère de famille -probablement). Au terme de l’interview je lui demande, Madame, nous avons apprécié votre disponibilité à répondre à nos questions mais avant de vous laisser partir, quelle est votre prétention salariale. Croyez-moi, nous avons passé presque 10 autres minutes pour amener la dame à nous répondre. Elle a pratiquement fondu et nous a dit ouvertement qu’elle n’était pas préparée à cette question. On s’est regardé, les membres du panel. Pour la rassurer, j’ai dis, madame, on ne va pas vous écarter si vous avez le meilleur profil pour avoir donné un montant élevé ou bas. Elle a fini par donner un montant presque tremblant et a ajouté, « mais c’est négociable. »

Leçon: Lors d’un entretien, la prétention salariale ne vise pas à savoir ce que vous voulez gagner, mais si vous savez ce que vous valez. En toute chose, connaissez votre propre valeur et tenez-vous en. Peu importe ce que cela peut vous coûter. Ce n’est pas de l’orgueil, mais la confiance en soi.

3. Un candidat, un jeune très déterminé, sûr de lui. Il a fait une bonne impression également. Un moment, ma collègue lui demande de nous donner 3 qualités et 3 faiblesses. Le Monsieur nous a fait une longue liste de ses qualités dont certaines ressemblent plus à des défauts. Il nous regarde droit dans les yeux et nous dit, « Messieurs pour être sincère, je n’ai pas de défauts. » J’ai reposé la question, il a confirmé qu’il n’a pas de défauts.

Leçon : La confiance en soi est une qualité qui, mal exploitée, peut traduire l’orgueil. Jusqu’ici, nous sommes tous des humains et chacun de nous a des défauts. Seules l’humilité et l’introspection nous permettent de les découvrir et les corriger.

Que la Lumière de Dieu éclaire nos pas, et Sa sagesse guide nos vies.

NB: Il ne s’agissait pas pour moi de partager ces histoires qui restent professionnelles, mais les leçons qui en découlent dont certains pourraient s’en inspirer.


« L’homme qui voulait être heureux »

Laurent Gounelle

Sur les Archipels du Sud-Est de l’Asie se situe l’île d’Indonésie. Son histoire, ses plages, sa gastronomie, ses croyances spirituelles -ses atouts touristiques tout court- font de l’île l’une des destinations qui suscitent la curiosité de plusieurs visiteurs d’horizon diverses…

Bali, la capitale, tout comme l’ensemble de l’île, se caractérise par son style de vie économiquement modeste, sinon pauvre. Mais cette pauvreté des balinais et balinaises se compense par leur si grande générosité. Sauf que ce trait distinctif de ce peuple si accueillant peut finir par ennuyer le visiteur tel que raconte Julian : «A Bali, les gens sont si gentils qu’ils disent toujours oui. Vraiment. Si vous dites à une fille « je vous trouve très jolie », elle vous regardera avec un beau sourire et vous répondra : « Oui ». Et quand vous demandez votre chemin, ils sont tellement désireux de vous aider qu’il leur est insupportable de vous avouer qu’ils n’en sont pas capables. Alors, ils vous indiquent une direction, sans doute au hasard. » P.12

Julian est le héro de l’histoire racontée à travers ce magnifique Chef d’Œuvre de Laurent Gounelle paru aux éditions Anne Carrière, le 13 février 2008 sous le titre “L’homme qui voulait être heureux”.

Enseignant de profession, Julian est un homme comme vous et moi qui a ce qu’il faut pour être objectivement heureux. Cependant, sans doute parce que prisonnier de ses propres croyances, de sa perception de soi-même et de son monde extérieur, il peine à l’être. Parti pour ses vacances à Bali, il décide, peu de temps avant la fin de son séjour, de rencontrer Maître Samtyang, un guérisseur très réputé qui aurait même soigné de hauts dirigeants… Ensuite ? c’est presque tout… L’aventure que vivra Julian dans ce petit village, à quelques kilomètres d’Ubud, au Centre de l’île, transformera le reste de sa vie –la votre probablement, quand vous aurez refermé les dernières pages de cette œuvre, en attendant d’y revenir.

Ce que vous en retiendrez, ce sont les nombreux enseignements que donnent le maître au touriste à l’issue d’exercices qui servent de prétextes pour exposer ses faiblesses à différents niveaux.

…Sur ce que nous croyons de nous-même et l’influence que cela a sur notre vie, le maître fait noter que « tout ce que vous vivez a pour origine ce que vous croyez. Quand on croit quelque chose sur soi, que ce soit en positif ou en négatif, on se comporte d’une manière qui reflète cette chose. On la démontre aux autres en permanence, et même si c’était à l’origine une création de l’esprit, cela devient la réalité pour les autres, puis pour soi » p24-25. Ce qui est mis en évidence, c’est le pouvoir de la pensée et son influence sur l’individu.

Cette perception de soi, lorsqu’elle s’avère négative compromet l’influence que nous pouvons avoir sur notre entourage et entraine un effet boomerang : « Par exemple, puisque vous avez inconsciemment peur d’ennuyer vos collègues, vous allez peut-être sans vous en rendre compte parler vite, bâcler votre intervention, pour ne pas leur prendre trop de temps et ne pas les lasser. Du coup, vous n’avez aucun impact, et votre anecdote perd de son intérêt. Vous le ressentez, et vous dites : « je suis nul quand je raconte des histoires. » Par conséquent, vous devenez de plus en plus mauvais, et, immanquablement, l’un de vos collègues va reprendre la parole et embrayer sur autre chose. À la fin du repas, tout le monde aura oublié que vous avez parlé » p.26

L’incapacité à décider pour soi et à vivre en conscience et en accord avec ses valeurs intrinsèques, à vivre en équilibre, c’est à dire en faisant le bonheur des autres sans compromettre le sien, le manque d’assurance, l’hésitation, le doute, la peur d’être jugé ou d’être aimé… apparaissent comme autant de facteurs qui déterminent notre bonheur et qui doivent ainsi être maitrisés par quiconque y aspire. Autrement, l’intéressé est condamné à vivre malheureux.

A cela s’ajoute, selon le maître, la nécessité de reconnaître et de croire en l’existence de Dieu car, « les gens qui croient en Dieu et pratiquent leur religion, quelle qu’elle soit, de façon régulière, ont une espérance de vie de 29% supérieure à celle des autres… c’est la croyance qui compte, pas le comportement, même si, et les ecclésiastiques le savent bien, les rituels entretiennent la croyance… » p87 

Dans cette quête perpétuelle du bonheur, « chacun rencontre dans son existence un grand nombre d’opportunités en tout genre, certains savent les repérer et les saisir, d’autres pas. »p.90. Votre capacité à saisir les opportunités qui se présentent à vous sont quant à elles toutes aussi déterminantes que les facteurs précédents…ces extraits ne résument pas assez la trame de l’histoire mais donnent un aperçu des leçons qui attendent le lecteur.

La façon dont Maître Samtyang mettra fin à la rencontre, les sentiments avec lesquels repartira Julian, l’impact qu’aura cette rencontre sur sa vie ainsi que sa conversation avec Andy sur la plage et ce qui en découlera sont, entre autres, autant de choses qui retiendront l’attention du lecteur.

Ce que je ne vous dirais surtout pas c’est que toute cette histoire, tout ce condensé d’enseignements qui façonneront votre façon de penser, de vous re-définir et qui vous permettront tout simplement d’aborder la vie différemment, tient en 168 pages… seulement !

Soyez heureux, cela vous va si bien !


Journalistes et Donald Trump : nous te détestons. Je vous hais !

Hier matin, en suivant le journal sur la chaîne ‘France 24’, j’ai compris jusqu’où la presse peut être manipulatrice à dessein sur des sujets précis pour des considérations typiquement éditorialistes voire politiques ou même commerciales.

Il y a deux jours, le 45ème Président des Etats-Unis était devant le Congrès, selon la tradition démocratique du pays, pour présenter sa politique aussi bien intérieure qu’extérieure après son entrée à la maison Blanche en Janvier dernier. Donald Trump, pour ce premier exercice a été, pour le moins qu’on puisse dire, impressionnant. Mais les journalistes s’efforçaient de montrer l’image négative de l’homme au point qu’ils s’évertuaient à occulter par exemple les ovations qui suivaient son annonce de dissoudre le fameux ‘ObamaCare’.

Ce qui était presque drôle c’est lorsque la présentatrice du journal et son invité trouvaient que parmi les nombreuses ‘standing ovation’ auxquelles il a eu droit, la majorité de ceux qui ovationnaient étaient des Républicains, comme si de loin on pouvait distinguer un Démocrate d’un Républicain parmi ces centaines de personnes réunies. Au lendemain de ce discours, le marché boursier d’Asie a connu une forte croissance qui explique l’accueil favorable qui lui a été réservé. Il en faut certes plus, beaucoup plus, pour encenser l’un des plus controversés présidents de l’histoire des Etats-Unis, celui-là qui se moque du « politiquement correct » auquel le monde a jusqu’ici eu droit sans se demander si c’est ce dont la société actuelle avec ses mutations socio-économiques et géopolitiques a besoin. Tout porte à croire qu’il y a un ordre préétablit, un système sous forme de tunnel créé des mains des hommes, ceux-là qui dictent la morale prédominante qui caractérise ce que certains appellent « le nouvel ordre mondial ». Ce système, quiconque s’en éloigne devient l’ennemi commun et ainsi scie-t-il/elle le tronc de l’arbre sur lequel il est perché et qui pourrait entraîner sa chute – fatale, dans certains cas. Kennedy n’avait pas compris. Il existe cependant une classe révolutionnaire et anticonformiste qui ne semble pas se soucier de cette chute et qui apparaît plutôt déterminée à mener le combat de son abolition au prix de ses intérêts, de sa vie aussi.

Ils étaient nombreux, ces puissants de la sphère médiatique, qui ont soutenu ou fait croire que Trump ne pouvait pas être le candidat des Républicains, il a littéralement écrasé tous ses seize concurrents. Ce sont les mêmes qui disaient qu’il ne pouvait pas être élu, sondages et statistiques à l’appui, il a battu celle qu’ils adulaient. Ils ont contesté sa victoire, alléguant une main extérieure (celle de la Russie), mais son élection a été confirmée par une très large majorité des grands électeurs (donc élu deux fois). Ils ont annoncé l’échec de son investiture suite aux mouvements populaires de contestation qui ont suivi les résultats, mais elle a été plutôt un succès quoique mitigé en termes d’affluence, comparé à celle d’Obama en 2008.

Aujourd’hui, ils prédisent l’échec de son mandat et même sa destitution. L’homme, lui, semble cependant déterminé à faire son chemin en restant droit dans ses bottes et en maintenant une certaine cohérence dans sa logique de raisonnement, disons ses promesses de campagne. « Je ne suis pas le gardien du monde, mais de l’Amérique » a martelé lors de son grand oral ─ les gestes avec, celui que nos journalistes qualifient de président isolationniste, conservateur ou protectionniste, c’est selon. «L’amérique d’Abord», tel était sa principale promesse de campagne en 2016. C’est d’ailleurs cette promesse qui justifie qu’il ait augmenté de 54 milliards de Dollars US, soit 9%, le budget militaire au détriment des autres départements afin, dit-il, de renforcer la sécurité du peuple américain.

Il faut admettre un tâtonnement très perceptible, notamment au niveau du choix de ses hommes, lesquelles sont soient contestés ou simplement rejetés, mais cela s’explique par le fait que d’abord l’homme n’a aucun passé politique, ensuite le passage du pouvoir d’un individu à un autre à la maison Blanche un un long et lourd processus d’où les deux mois de transitions qui suivent les élections et quand cela intervient dans le cadre d’un changement de système politique (des Démocrates aux Républicains ou vice-versa) cela s’avère davantage difficile. Obama a connu, lui aussi quelques tâtonnements en 2008 avec le retrait de Tom Daschle et de Nancy Killefer annoncés pour être respectivement Secrétaire à la Santé et Chef de la Surveillance. Avec élégance, il a reconnu s’être trompé. Mais Trump n’est pas Obama. Il ne faut pas forcément espérer la même réaction.

A côté, la guerre Trump-Media, déclarée depuis les primaires continue et est visiblement loin de s’achever. Une sorte de ‘vous ne m’aimez pas, moi non plus.’

Sans forcément être un fan de Trump ni de sa politique notamment sur le Changement Climatique ─ même si j’admire son aptitude à surmonter les situations qui pourraient, chez d’autres, entraîner la chute, sa capacité de résilience tout court face aux lynchages médiatiques et aux courroux d’une société formatée et manipulée par les lobbys d’un système dont il se targue d’être le seul à pouvoir combattre ─ je crois qu’à un moment donné, elles devront ─ ces puissantes machines médiatiques ─ savoir s’arrêter et abandonner le projet de diabolisation de l’homme, ainsi que leurs machinations parfois dévergondées tendant à présenter une image, celle qu’ils veulent présenter au monde, d’un homme dépourvu de sens. On n’accède pas au plus puissant poste au monde sans en avoir les compétences. Ou alors, c’est la société américaine elle-même dans son grand ensemble qui est dépourvue de raison. Elles devront surtout admettre que Trump est parvenu à ce poste parce qu’une grande partie des américains en a décidé ainsi. Même si la possibilité d’un complot bien organisé qui pourrait entraîner sa destitution ou ’impeachment’ pourrait être considérée, quoique très faible, elles devront se convaincre qu’il pourrait passer plus de temps qu’elles ne le croient dans le bureau ovale. Sinon, plus ça continue, mieux on se rend compte que tout ceci est fait à dessein pour des raisons plutôt commerciales, ce qui serait dans ce cas alors assimilable à de la démagogie et à l’escroquerie morale des peuples. Personne ou très peu s’en aperçoivent.

Dans toutes les sociétés du monde, les dirigeants sont à l’image des peuples qu’ils représentent. Cela s’applique aussi aux Etats-Unis.

Comme cela l’a été en 2016, sa réélection pourrait surprendre le monde en 2020. Pour le moment, il est prétentieux de l’affirmer, mais il s’y prépare déjà. D’ailleurs, alors qu’il attendait sa prestation de serment, il a choisi son slogan de campagne pour les présidentielles de Novembre 2020 : « Keep America Great ! ».

Ce billet était à l’origine destiné à être posté sur mon mur Facebook, mais vu sa longueur, j’ai plutôt décidé de le publier sur mon blog, pour en même temps signer mon retour après huit mois d’absence. J’écrirai désormais, un peu plus sur la politique internationale, et américaine en particulier, bien sûr, sans prétendre en être un spécialiste mais juste des commentaires personnels que je partagerais, sur des sujets qui me passionnent en admettant les limites de mes analyses.


A Andréa, pour la dernière fois

La mort, pour paraphraser quelqu’un, est une voleuse. Elle prend, elle garde tout ce qu’une personne est, ce qu’elle était. Et quand la mort enlève quelqu’un de si extraordinaire qu’Andréa, elle n’emporte pas que son passé avec elle, elle emporte ce qu’elle a été pour ses proches au quotidien…

Chère Andréa,

Aujourd’hui, on exposera ta photo sur l’espace du petit terrain de Yogougon Selmer Rue des Princes. Ta famille, tes ami(e)s et autres personnes qui ne te connaissaient même pas, mais souffrant la douleur de ta tragique disparition, chanteront, danseront et surtout couleront des larmes jusqu’à l’aube. On racontera des anecdotes, des témoignages de qui tu as été. Le prêtre dira une prière pour le repos de ton âme, puisque les péchés, tu n’en as plus pour qu’on demande qu’ils soient pardonnés. Demain, tôt le matin, on te sortira du froid de la morgue, ta silhouette innocente d’Ange sera presque méconnaissable. Demain, à cette même heure, ta famille, tes ami(e)s et toutes ces personnes pour qui tu comptes -dans leurs habits noirs de deuil, les yeux enflés par des heures de pleures, le cœur en lambeau -prendront le chemin du cimetière municipal de Yopougon, toi devant.

Je ne serai à aucune de ces occasions. Je ne serai pas là pour te voir partir sans un regard furtif que tu refuseras sans doute de jeter en arrière de peur de croiser les yeux de ta mère désormais seule. C’est peut-être mieux ainsi que je n’y sois pas même si cela fait mal. Mais la douleur aurait été encore plus insupportable en te voyant t’en aller sans un mot. Cependant, de là où je me trouve en ce moment, j’ai tenu à t’écrire cette lettre, pour la dernière fois.

Je devine à quel point tu as si hâte de quitter ce monde de chimère d’hommes sans cœurs aux esprits vagabonds. Tu serais si pressée de rejoindre tes sœurs parties trop tôt au point que tu n’aurais certainement pas assez de temps pour me lire. Mais, garde cette lettre pour la lire sur ton chemin vers Dieu où une place de choix t’est réservée à Sa droite. J’essaierai d’être bref pour ne pas t’ennuyer.

Chère Andréa,

Selon la croyance, « le péché originel ne peut être lavé que par les eaux du baptême. Mais, ce sont les péchés suivants qui sont les plus difficiles à effacer, et puisque le pardon des offenses n’est accordé qu’au véritable repentant, le mal pur ne peut jamais être éradiqué ». Comme tel, l’erreur pour tous les humains est de croire qu’il peut y avoir des hommes dits biens. C’est fou et faux de le croire. Il y a seulement deux catégories de personnes. Celles qui dominent le mal faisant partie intégrante de la nature humaine et celles qui, trop poussées par leurs instincts bestiaux, répandent le mal par tout, faisant couler le sang d’innocents sur leurs passages. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient Gbailly, ton tueur. Parler de lui, c’est le célébrer. Il n’en a pas droit. C’est pourquoi, je consacrerai ces lignes à te demander une seule chose : Pardonner.

Pardonne d’abord à ton père de n’avoir pas su préserver les liens familiaux, ce qui pourrait expliquer l’éducation ratée de Gbailly. Pardonne ensuite à la société dans laquelle a grandi Gbailly et qui lui a sans doute tendu l’appât du gain facile auquel il a fini par mordre et qui l’a emporté, toi avec. C’est sûr que de la cellule des grands criminels de la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) où il se trouve en ce moment, l’effet de la drogue passé, il éprouve des remords, lesquels le rongeront jusqu’à la moelle pour ensuite le faire disparaître de la surface de la terre, un jour, comme toi. La seule différence est que, contrairement à toi qui part sans péchés puisque désormais les tiens sont portés par Gbailly, lui, il tombera un jour, sans doute face contre terre, sous le poids trop lourd de chagrins, de solitude et de misères d’une vie ratée… C’est sûr que si la vie lui offrait une seconde chance, il la saisirait cette fois avec plus de sagesse, mais on ne reprend pas une vie. On continue sur sa lancée, fut-elle fatale.

Vide ton cœur de toute colère, Andy. Là où tu vas, seuls y entrent les cœurs pures. Quand tu rejoindras tes sœurs, ensemble, continuez de prier pour votre mère, votre père aussi. Il devrait être tout autant détruit de perdre, presque, deux de ses enfants au même moment. Après ce drame, c’est sûr que cette famille ne sera plus la même, mais priez pour que Dieu donne à votre père, la force de pouvoir re-jouer son rôle de chef de famille pour protéger ce qui lui en reste de tel.

Chère Andréa,

Demain, avant de refermer ta tombe, le prêtre fera une dernière prière pour te recommander aux anges, les priant de te conduire jusqu’au Père Divin. Quand tu seras portée en terre, tous te tourneront le dos. Les pieds lourds, sur le chemin du retour, chacun se souviendra et chantera dans son cœur ce cantique d’Adieu :

« Il n’y a qu’un chemin pour aller au ciel, est-ce que je pourrai y aller aussi ? Les Anges par milliers, partent pour le ciel, ils sont vertus en habits blancs, et moi, pauvre pécheur, je me pose la question, est-ce que je pourrai y aller aussi ? ».

Va-t’en sans crainte, Andy. Ni pour le lieu inconnu où tu vas, ni pour ta mère que tu laisses. La plaie est sans doute encore béante. Mais elle se cicatrisera, j’en suis certain. Je passerai la saluer toute fois que je suis de passage au quartier. Nous serons tous là, chacun à sa façon, pour lui rappeler qu’elle n’est pas seule à te pleurer.

Tu resteras à jamais dans nos cœurs. Entre deux causeries, deux éclats de rires insouciants, nous nous souviendrons de toi. Nous parlerons de toi.

Nous verrons chaque nouvelle journée que Dieu nous offre comme un cadeau et nous l’aborderons avec autant de courage et de détermination, de douceur et d’amour aussi comme tu l’as toujours montré pour tes ami(e)s, les gens autour de toi et surtout pour ta mère.

Paix à ton âme, Andy !


Il l’a tué, Andréa!

Gbailly, le tueur d'Andréa aux mains de la Police
Gbailly, le tueur d’Andréa aux mains de la Police

Dans son sens originel, l’agression est une attaque non provoquée, injustifiée et brutale contre quelqu’un. Vu comme tel, l’acte d’agression paraît une exclusivité des êtres en ayant reçu les caractéristiques à leurs naissances, lesquels, en grandissant et poussés par leurs désirs de fauves développés par une société matérialiste, ils tentent d’exprimer à tout prix comme s’ils eussent un devoir moral à accomplir. Mais, au sein d’une société, quand viennent à s’effriter les liens de la famille, socle de la société, les cordes moraux des membres qui la composent s’infléchissent forcement ouvrant ainsi un boulevard sur le crime. En ce moment-là, la puissance de la faculté agressive dévolue aux âmes malades s’empare de la société dans toute sa composante faisant de chaque individu, une menace pour son semblable.

Gbailly Lekagnon a tué Andréa, d’un seul coup de couteau ! Les faits que je reproduis ci-dessous, mots pour mots, presque,  m’ont été rapporté hier matin, par Ella, la meilleure amie d’Andréa, sous l’émotion, d’où le manque de cohérence par endroits:

« Gbailly est le demi-frère d’Andréa (fils qu’a eu le père d’Andréa avec une seconde épouse). Andréa, elle a perdu tous ses autres frères et sœurs donc elle reste l’unique enfant de sa mère. Gbailly, n’habite pas à la Selmer ici, il habite, quelque part là-bas, au nouveau quartier mais il vient ici de temps en temps. Comme c’est un voleur et il fume la drogue, on l’a interdit de venir ici. Andréa nous a dit, Jeudi, sa maman est sortie vers les 13h-là, donc elle est restée seule à la maison. Vers 15h, Gbailly est venu et quand Andréa l’a vu, elle a dit toi Gbailly-là papa n’a pas dit de ne plus venir ici, tu viens faire quoi ? Il a dit à Andréa, donne-moi la clé de la chambre. C’est ça, elle a dit, je n’ai pas la clé, c’est dans ça, comme d’habitude ils se disputent mais pour plaisanter-là, elle l’a laissé et est venu s’asseoir au salon. A sa surprise, il s’est mis à la brutaliser et l’a poignardé une fois dans le ventre vers son nombril. Elle est restée couchée et vers 16h sa maman est revenue, elle a tapé à la porte comme y’avait personne pour ouvrir, elle est venue me demandé si Andréa est chez moi, j’ai dit non et elle est reparti taper encore et puis Andréa s’est débrouillé pour venir ouvrir. Quand elle a ouvert, elle est tombée dehors et puis elle a dit à sa maman, faut pas rentrer, il est dedans, il a couteau. Sa maman a crié et les gens sont venus et ils l’on prit pour l’envoyer à l’hôpital, à la clinique les Oliviers vers le nouveau quartier. Arrivé là-bas, les docteurs disent ils vont l’opérer mais ils veulent une caution de 300,000f d’abord. Donc ils ont appelé son papa au travail, quand il est arrivé, il a donné l’argent, ils ont fait les examens. Après ils disent, il faut encore 80,000f son papa dit soignez-la pendant qu’on cherche l’argent-là. Après, les médecins ont dit c’est grave qu’il faut l’envoyer au CHU. Ils l’on envoyé au CHU de Cocody, là-bas, ils ont fait les examens et après ils l’on opéré. Quand elle s’est réveillée il était vers 4h du matin, le vendredi. Elle parlait, on a causé un peu elle nous a raconté que le jeune ne l’a pas violé mais avait prit la drogue et l’a brutalisé avant de la poignarder. Elle était devenue pâle, elle était anémiée. On lui a placé une poche de sang. Après, elle dit qu’elle a froid et on l’a couvert. Un moment, elle a commencé à dormir. Moi je suis rentré vers 5h du matin, pour prendre quelques affaires et repartir le lendemain matin. On dit après elle a vomi beaucoup de sang et le médecin dit si c’est comme ça, on va l’opérer encore et il l’on mit sous anesthésie. Moi j’étais à la maison, j’entends des cris, on m’appel pour me dire Andréa est morte. Comme ça ! »

Andréa est donc décédée le Vendredi 8 Juillet à 18 ans. Elle était élève en classe de Terminale et devrait présenter l’examen du Bac débuté le Lundi 11, c’est-à-dire hier. Finalement, ça ne sera pas nécessaire puisqu’au ciel, là où elle va, elle n’en aura pas besoin…

Dans son corps frêle et innocent, on a injecté le formol qui l’a raidi, noirci et absorbé le peu de sang qui lui est resté. A l’heure qu’il est, elle ne vaut plus qu’un tas de glace rangé dans un casier de la morgue attendant d’être portée en terre le samedi prochain.

Portée par ses pairs, des anges aux ailes géantes, son âme, elle, n’aura pas attendu ce jour pour filer tout droit vers le ciel, là où attendent, des bouquets de fleurs à la main, les saints de Dieu pour l’introduire dans au paradis où lui est réservée une place de choix à la droite du Père.

Sur une de ses photos postée sur Facebook, le regard levé vers le ciel, elle a écrit : »J’ai fait ma part, dieu fera le reste« . Rassures-toi, Andy, Il le fera bien plus, bien mieux que tu ne le pensais. Il te rendra justice. Il saura consoler ta mère démolie par la douleur sans nom.

Quant à toi, saches que depuis hier, Gbailly est aux mains de la police. Il répondra de ses actes. Pardonne-lui et laisse Dieu et les hommes faire le reste. De toutes les façons, dans ton petit cœur d’Ange, il n’y a pas assez de places ni pour la colère, ni pour la haine, encore moins pour la rancune. Vas au ciel, c’est là-bas que vivent les Anges et les Saints. N’oublie pas de sortir couverte pour ne pas prendre froid. Laisse ce monde aux vampires de la race de Gbailly contre qui ceux que tu as laissé ici, ami(e)s, parents et connaissances livrent une bataille sans merci au quotidien…

Je ne pensais pas pouvoir écrire ce billet tant l’émotion était si forte depuis hier. Mais les conditions de ta mort, même incomplètes, devraient être sues pour que plusieurs autres milliers de voix partout, prient pour le repos de ton âme. De là où tu te trouves en ce moment, n’oublie pas d’intercéder pour ta mère. Elle t’aime! Nous aussi!!

 A Dieu, ANDY !

 


…pour l’avenir de nos enfants

Partir est un sacrifice, et tout sacrifice implique une part de douleur intérieure que ressent celui qui le fait. Cette atroce souffrance que ce départ engendre fait naitre une nouvelle détermination, un indéfectible dévouement et un devoir moral de poursuivre son rêve jusqu’à son aboutissement absolu.

Un matin, certains sous la canicule, d’autres sous la pluie, vous avez sorti vos valises et pris le chemin de vos rêves. Le cœur étreint par la douleur de la séparation, vous avez laissé derrière vous tous ceux que vous aimez plus que tout, dans l’espérance de lendemains meilleurs.

Une fois chez eux, en Europe, en Asie, en Amérique, en Océanie ou même en Afrique -partout où le destin vous a conduit- vous aviez, au début, éprouvé un brin de soulagement, celui que procure le sentiment illusoire d’un départ nouveau. Mais très vite, à peine vos valises remplies de vos rêves d’ivoiriens posées, la réalité de l’aventure s’est imposée à vous.

Les premiers signes de vos illusions vous sont apparus à travers le nom par lequel vos hôtes vous ont identifiés. Le matin, quand vous ne contribuez pas à leur économie, vous êtes des immigrés. A midi, quand vous commencez à travailler et que vous payez vos impôts, vous êtes un expatrié. Le soir, disons, des années après, quand vous semblez intégrés dans leurs sociétés mais sans doute pour vous rappeler vos origines que vous semblez fuir, ils vous appellent « ivoiriens de la Diaspora ». Dans tous les cas, vous êtes et demeurez des étrangers, tellement étranges que vous êtes surveillés au quotidien parce que votre présence, à elle seule, constitue une menace.

Selon l’histoire, l’ivoirien n’était pas un aventurier. Il accueillait chez lui plutôt qu’il n’allait. Ceci à tel point qu’aujourd’hui presque chaque grande ville de la Côte d’Ivoire a un quartier qui porte le nom d’un pays ou d’une communauté étrangère : « Quartier Maroc, Quartier Air France, Quartier Biafra, Camp Chinois, Mossikro, Petit Bamako, Petit New York… »

C’est tellement magnifique d’appartenir à un pays culturellement si dense et qui fait de cette diversité une source de richesse. C’est cette richesse qui justifiait sans doute que jusqu’aux années 90, presque très peu d’ivoiriens rêvaient d’aller à l’aventure. Quand les remouds sociaux ont commencé avec les grèves estudiantines, tout a changé et la vague de départ s’est enclenchée. Depuis lors, elle ne s’est plus estompée et s’intensifie chaque jour un peu plus.

Aujourd’hui, nous sommes plusieurs milliers, vous et moi, à avoir fait le choix de vivre nos rêves ivoiriens loin des nôtres. Mais l’aventure a ses caprices que subit l’aventurier. Elle te prive de tes plats préférés, de ces visages familiers et sources de bonheur de chaque membre de ta famille. Ces fous rires entre amis autours d’un repas le soir d’un weekend de fête cèdent la place à des moments de solitude et de nostalgie… Un collègue disait que lorsque vous vivez dans un pays étranger, tout change chez vous. Votre façon de parler, de marcher, même de prier à l’Eglise. Chez vous, vous bombiez la poitrine et balanciez plus loin les pieds en marchant. A l’étranger, même sans qu’on ne vous le demande, vous faites attention à tout, à chacun de vos faits et gestes…

Mais tant que, même partis nous maintenons le cordon ombilical qui nous lie à la mère patrie ; tant que ce qui nous motive à y demeurer reste le souci de faire fortune et revenir investir chez nous, le jeu en vaut la chandelle.

C’est pourquoi, en m’adressant à vous, que l’on vous appel immigrés, expatriés, étrangers ou simplement ivoiriens de la diaspora, je vous exhorte à plus de courage et surtout à ne jamais refermer après vous le tunnel qui vous a conduit là où le destin a voulu que vous vous trouviez. Ceci pour que, quand viendra le temps des bilans, bombant la poitrine de fierté comme un moine sûr de sa prière, vous puissiez revenir ici -c’est à dire, chez vous ;  là où la police ne vous surprendra pas pour vous demander votre carte de séjour en allant acheter une boîte de conserve au supermarché situé à 5 mètres de chez vous ou en vous rendant chez un ami habitant à seulement deux rues de chez vous.

A l’opposé, à ceux qui sont restés, vous n’aurez pas fait le mauvais choix. Sachez que l’adage, « on n’est mieux que chez soi » porte son sens. Sachez surtout que l’Eldorado n’est pas ailleurs, mais sur la terre de vos pères, votre patrie. Sachez que certains parmi ceux qui sont partis ont réussi leurs vies et s’y plaisent, mais d’autres s’y déplaisent et enchainent les heures de travail dans différents métiers rien que pour être à mesure de s’acheter leurs billets du retour. Sachez que le bonheur ne s’octroie pas, mais se crée. Comme tel, vous pouvez le créer partout où vous êtes, y compris chez vous. Profitez donc de l’avantage que vous offre le système parce qu’étant des nationaux et que nous, de loin, jalousons ; celui d’aller et venir sans crainte, d’effectuer vos transactions et autres activités sans restrictions et même d’être entouré de gens qui vous ont vu naitre ou grandir, qui sont heureux de vous voir heureux. Dissipez vos rancunes nées de plusieurs années de guerre. Donnez son sens au « vivre ensemble libres et heureux » ; Faites place à l’amour dans vos cœurs. Soyez tolérants envers vos voisins, furent-ils, eux aussi, des étrangers chez vous. Sortez des prisons dans lesquelles vous a enfermé la haine suscitée et nourrie par des hommes politiques égoïstes se servant de vous pour étancher leurs soifs inassouvies de pouvoir. Soyez guidés par le souci constant de préserver ce qui vous unit qui reste bien plus grand que ce qui vous divise, c’est à dire la partie de terre qui a été témoin de vos premiers jours de vie -la Côte d’Ivoire.

Le moment venu, où que nous soyons, nous reviendrons. Certainement pas collectivement, puisque nous n’obtiendrons évidemment pas à la même échéance ce pour quoi nous sommes partis ; mais nous reviendrons quand même, même individuellement. Ensemble, avec vous qui êtes restés, nous continuerons le travaille de milles générations entamé par ceux qui nous ont précédés, pour le parfaire… pour l’avenir de nos enfants.

A Traoré Youssouf, dit Baïf,

mon ami, mon frère

vivant son rêve d’ivoirien en Tunisie,

Et à tous les expatriés, immigrés ou étrangers.


« Le Menuisier de Calavi »

La nature est parfois cruelle. Les prédateurs sont partout. Des êtres qui évoluent à la périphérie de l’humanité. Indifférents aux limites qu’imposent la morale et la conscience, une race sans pitié dont l’arme la plus redoutable est leur capacité à se fondre dans la masse. Aissè Bénoit Tokoumbo –ABT ou ‘’Abété’, pour les intimes, s’en ait rendu compte, mais bien trop tard…

En Février dernier, lors d’une mission à Cotonou, j’étais dans une librairie pour m’acheter l’œuvre « Nos Rêves d’Afrique » de Stefanie Zweig. J’ai fais le tour de tous les rayons, sans succès puis, en sortant, presque désespéré, j’ai vu ce roman « Le Menuisier de Calavi » de Dave Wilson, qui semblait me supplier de le prendre. J’ai cédé à la tentation plus par curiosité et pour son petit prix, 2,500fcfa, que par envie ou par amour pour cette œuvre et son auteur qui m’étaient jusqu’alors inconnus. Dès les premières pages, dans l’avion du retour, j’ai su que je tenais entre mes mains, un chef d’œuvre de la littérature noire contemporaine.

« Parti sous la bénédiction de ses oncles de sa belle province de l’Ouémé, du côté de Pobè où il passa toute son enfance » p11, Abété s’installa à Cotonou dans la perspective d’une vie meilleure, avec pour seul diplôme, un Certificat en menuiserie. Mais, que peut un menuisier dans une lutte sociale à l’issue presqu’incertaine même pour des ingénieurs ? Le village n’est pas la ville. Le fossé entre les deux est énorme. Toutefois, même dans cet « univers de sauce tomate trop fluide, sans viande ni poisson, et de table sans victuailles, l’orgueil a son mot à dire » p8. Imbu de sa dérisoire fierté des bas-fonds, Abété qui sait que « l’honneur de l’homme est aussi mesuré à l’aune de l’épreuve que suscite l’impécuniosité » P11, s’était résolu à affronter la vie -de face.

Tôt le matin, jusqu’au coucher du soleil, Abété frappait du marteau le bois têtu afin d’avoir le minimum pour assurer le repas familial. Le soir venu, il parcourait les rues de la capitale pour y défouler le trop-plein des relents de sa haine développée contre cette société urbaine individualiste et hautaine. Les souffrances d’Abété se perpétuaient. Peu à peu, il se sentait pourri au dedans de lui-même. Il résolu donc d’écouter ce que lui ordonnait sa conscience, quitter Cotonou pour Calavi. Mais partir, c’est s’exposer à l’inconnu. Rester c’est végéter sans solution. Le choix ne semblait pas évident. Heureusement, Akosiwa, son épouse, l’une de ces rares divinités sur terre dont la seule présence aux côtés d’un homme poussait à des exploits, était là pour le soutenir ; Cette dernière ne s’opposa pas à l’idée de partir. La décision de quitter la concession de Mibâkoué dans le quartier Jonquet fut donc définitive.

« L’être humain est ainsi fait qu’il lui arrive parfois d’avoir la nostalgie des souffrances dont il espère se débarrasser.» p23. Dans le taxi qui le conduisait à Calavi, Abété éprouvait un sentiment de peine et de regret qui lui paraissait difficile à expliquer…

Calavi semblait préparé à accueillir la famille Aissè. Le lendemain de son arrivée, tôt le matin, Abété reçu la visite de Assogba Hounkarin Mesmin ²Ass-mess², le délégué du quartier qui lui parla de Calavi et surtout des piliers de leur quartier -notamment de « Adjou Tessi, bûcheron ; Nouglo Dossou, ancien maître-maçon ; Akanni Comlan, blanchisseur ; Akambi Coffi, tisserand ; Atiwé Kokouvi, chanteur traditionnel et surtout de Fumilayo Tola, commerçant »p58 -dont il vanta la générosité et la convivialité. Abété s’endra très vite compte…

La terre, dit-on, ne trahit point celui qui la cultive. La famille s’était résolue de commencer par un jardin potager.  Abété fit la demande et reçu de Fumilayo, un prêt de 100.000fcfa plus des sacs et des arrosoirs. Les journées de travail se suivaient et se ressemblaient trainant avec elles leurs corvées parfois empruntes de mépris mais aussi d’espoirs pour ce couple soudé et acharné, tenace sous la canicule, heureux sous la pluie, insensible à tout ce qui n’encourage pas.

« Au fil des matins frisquets et des crépuscules précoces, la vie avait progressivement perforé le meuble manteau de la terre nourricière »p71. La terre de Calavi offrit à la famille Aissè ce que leur avait refusé, sans pudeur, Cotonou. Tout Calavi et même quelques-uns de Cotonou défilaient chez les Aissè pour s’acheter leurs légumes. Aissè remboursa toutes ses dettes et comptait même parfois plusieurs milliers de francs, rien que pour lui seul, sans créanciers. Le père de Razak et de Waly assurait désormais dignement le devoir que lui conférait son statut de Chef de famille…

Quand vous avez connu une existence semblable à celle d’Abété, parsemée d’autant d’embûches, vous vous rendez compte de la fragilité de la vie. Vous voyez différemment la société et les hommes qui la font. Mais, le seul mérite d’avoir un cœur d’agneau dans un monde de loup c’est avoir son destin écourté même en tentant de sauver un vieux loup édenté, affamé et mourant.

« Sous l’immense baobab à l’ombre duquel une partie du dispensaire abritait son toit rouillé, un résidu d’homme se morfondait, tributaire de la générosité ambiante »p85. Il s’appelait Tayo, surnommé ‘Afodokponon’, l’Unijambiste. Abété fut pris de compassion en voyant cet être que la vie avait rejeté. Pour lui, « c’est tellement facile d’être comme lui »p86. Sa compassion se mua en une amitié avec l’Unijambiste à qui il offrait des pièces d’argent chaque fois qu’il passait par là. Mais la femme, disent certains, est doté d’un instinct qui ne la trahi point. Akossiwa, pourtant si altruiste, s’opposait à cette amitié. Abété, lui, s’obstinait. Ça dura plusieurs mois…

Un matin, alors qu’Abété se rendait à Cotonou avec dans la poche, 340,000f qu’Akossiwa et lui avaient rassemblés pour leur projet d’achat d’un terrain, il aperçut l’unijambiste et cherchant une pièce à lui remettre, il fit sortir la liasse de billet mais parvint pas à retrouver la pièce. Il promit à son ami, de revenir plus tard. Une telle attitude de celui qu’il considérait jusque-là comme son ami causa à Afodokponon une profonde blessure. «Ce salaud insensible et hypocrite ne pouvait-il pas aller chercher de la petite monnaie chez le boutiquier ? et s’il n’avait sortit ce gros parquet d’argent que pour m’humilier, me dégrader davantage, me faire ramper dans la misère, m’obliger à quémander ; à le supplier ? », p.212-213, peinait-il à accepter...

Pour chaque histoire, il y a toujours au moins deux versions. Pour chaque personne aussi. Il y a la facette que l’on présente au monde et celle gardée au plus profond de soi-même et qui surgit le moment venu. La haine créée par le mépris de son ami a fait ressurgir la nature réelle d’Afodokponon qui résolu de se venger. Il tendit une embuscade à Abété dans la forêt. Même dans l’adversité, Abété éprouva toujours de la compassion pour l’Unijambiste qui enfonça dans la poitrine du père de Razak et de Waly, de l’époux d’Akossiwa, le pieu qu’il avait trainé avec lui au lieu du rendez-vous fatal.  Abété, « puisant dans ce qu’il lui restait d’une force insignifiante venue d’ailleurs, mit un genou à terre, agrippa maladroitement une touffe d’herbes s’affala (…) »p247. Tayo « regarda le menuisier gigoter quelques minutes avant de s’éteindre », puis marmonna : « Les riches qui font le pauvre, ça se détruit »p248.

« Le Ménuisier de Calavi » est un Roman de 249 pages publié aux Editions AFRIDIC en 2008. Il a obtenu le prix « Président de la République ». Son auteur, Dave Wilson, alors producteur à RFI, est né en 1950 à Pointe Noire, au Congo.


Jacmen Kouakou: “Nous enseignons aux jeunes à créer leur propre richesse…”

« La jeunesse – écrivait Fénelon dans « Les aventures de Télémaque (1699) » – est la fleur de toute une nation, c’est dans la fleur qu’il faut préparer les fruits ». La Jeunesse ivoirienne l’a compris et s’y met. Jacmen Kouassi aussi. Ayant très tôt pris conscience de son rôle pour une Côte d’ivoire meilleure, ce jeune ivoirien s’est mis à la tâche sans relâche. Aujourd’hui, ce jeune entrepreneur, la trentaine révolue, père de famille et activiste sociale et fervent chrétien, fait partie de l’élite de la jeunesse ivoirienne. L’air jovial, le ton posé, l’humilité dans le parlé, l’élégance dans les gestes, c’est sans détours que Jacmen Kouakou, bénéficiaire du Porgramme YALI, section Afrique de l’Ouest, initié par le président Obama en faveur des meilleurs jeunes leaders Africains, s’ouvre à mes lecteurs dans l’entretien qui suit :

“…J’ai eu la ferme conviction de créer une entreprise pour lutter contre le chômage des jeunes…”

Chroniques des Temps Nouveaux (CTN): Bonjour Jacmen, entre nous jeunes on peut se tutoyer si tu permets. Merci d’avoir accepté cet entretien. Pour commencer, peux-tu te présenter à nous?

Jacmen Kouakou (JK): Bonjour Emile. Sans problème, soyons relaxe. Je suis Kouakou Kouassi Jacmen, aîné d’une famille modeste. Je suis Marié à Kodjahon Affoue Marie Christelle qui me soutient enormement, père de deux charmants garçons. Je suis diplômé d’un baccalauréat serie A2 obtenu au Lycée Khalil de Daloa, d’un Master en Anglais à l’Université de Cocody (Côte d’ivoire) et aussi de plusieurs Certificats en Gestion des Ressources Humaines et en Leadership. Je suis Traducteur Volontaire des Nations Unies en ligne depuis 2012. Passionné de l’entrepreneuriat, je membre du Réseau des Entrepreneurs Sociaux de Cote d’Ivoire (RESCI). J’aime écouter la musique Chrétienne. Selon mes amis, je suis un fin négociateur (rires…). Bref, je m’arrête là !

CTN: Tu l’as dis, tu es un entrepreneur, comment ont été tes débuts? D’où t’est venue l’idée d’entreprendre et comment a commence ton Projet?

JK: L’histoire de JC English Training Corporation a commencé une nuit vers 2 heures du matin dans le mois de Novembre en 2012. Je me suis reveillé et j’ai eu la ferme conviction de créer une entreprise pour lutter contre le chômage des jeunes dans mon pays, la Cote d’Ivoire voire au délà. La même nuit, je me suis mis à écrire les grandes lignes de ma vision. Comme il faut « battre le fer quand il est chaud », le lendemain matin je me suis lancé à la recherche d’une salle de classe pour exécuter le projet qui consiste à renforcer les capacités linguistiques des membres de ma communauté pour leur permettre d’avoir du travail et d’autres opportunités. Tu sais, à Abidjan j’ai vu des personnes manquer des opportunités de travail ou d’études tout simplement parce qu’elles n’ont aucune notion de l’Anglais. Donc l’idée de création de l’entreprise est partie de là. En plus de l’enseignement de l’Anglais, de la Traduction et de l’Interpretariat, renforcer les capacités des jeunes en entrepreneuriat est une autre mission de ‘JC English Training Corporation’. Nous enseignons aux jeunes à créer leur propre richesse, à ne pas attendre le gouvernement pour leur offrir du travail. Certains ont des idées innovantes, mais ne savent pas comment les exécuter, nous leur offrons un coaching afin de leur permettre de reussir leur projet.

CTN: En tant qu’entrepreneur, quelles satisfactions as-tu à ce jour et quelles sont les difficultés que tu rencontre le plus souvent?

JK: Tu sais, je tire ma satisfaction lorsque les “sans emplois” qui ont renforcé leurs capacités en Anglais à travers “JC English Training Corporation” me disent “Teacher, j’ai eu du travail parce que j’ai reussi mon test d’Anglais!”. Ma joie est grande aujourd’hui parce que grâce à ce projet, des dizaines de jeunes ont trouvé du travail, certains jeunes sont reçus dans les universités Asiatiques et Americaines.

Les difficultés sont nombreuses, et se situent à plusieurs niveaux. Il y a l’insuffisance de resources pour déveloper le projet. Par consequence, il y a un manque d’infrastructures adéquates pour la formation. Je veux parler de salles et de matériels de formation répondant aux normes internationales. Cependant, ‘découragement n’étant pas Kouakou Jacmen’, j’ai cru en ma vision et en mon projet, et petit à petit des coeurs ont été sensibles à mon projet. J’ai même le soutien inconditionnel d’un ami de la Fac, Monsieur Evariste Aohoui, à qui je voudrais rendre un vibrant hommage ici. Il a fermement cru en mon projet. Aujourd’hui, il me soutient beaucoup dans mes formations en entrepreneuriat.

“Mon désir, c’est que chaque entrepreneur s’intéresse à la protection de l’environement…”

CTN: En plus d’êre un entrepreneur, on te voit beaucoup impliqué dans des initiatives citoyennes comme la protection de l’environnement, la formation des jeunes, peux-tu en dire plus?

JK: Certains amis me demandent de quel coté je suis, Entrepreneur ou protecteur de l’environnement? J’ai toujours répondu qu’un leader a plusieurs missions pourvu qu’elles impactent positivement sa communauté. J’ai aussi compris qu’un entrepreneur pourra être productif et mener à bien ses activités à long terme s’il travail dans un climat sain d’où mon combat en incitant la population et les jeunes notamment à avoir des attitudes écocitoyennes. Et puis à quoi serviraient mes actions si ceux à qui je veux donner du travail demain sont malades à cause d’un climat dégradé? A absolument à rien! Pour moi, c’est le plus grand défi auquel le monde doit faire face. Je fais donc ma part. Aujourd’hui, la plupart des maladies qui déciment l’humanité sont liées au changement climatique. Mon désir c’est que chaque entrepreneur s’intéresse à la protection de l’environement s’il veut être plus rentable et productif. La santé avant tout!

CTN: Tu es si jeune, marié et père de deux enfants, pourtant cela ne semble pas t’empêcher de faire autant de choses à la fois. Quel est ton secret? Comment parviens-tu à concilier ta vie familliale et professionnelle?

JK: (Rires…) Cette question revient chaque fois que je suis en face de mes paires. Mon sécret c’est DIEU. J’ai dit à Dieu, ‘tu vois le bagage que tu m’as fais porter, je ne refuse pas de le porter, c’est ma mission, alors occupes-toi de moi et de ma famille.’ Et il le fait si bien! En plus j’ai une magnifique épouse qui m’aide beaucoup. De mon coté, je fais l’effort d’être le plus organisé possible. Quand je suis à la maison, c’est ma famille. Quand c’est l’heure du travail, la famille doit céder la place. J’ai peu de distraction, car pour moi ce n’est pas le moment.

“…derrière un échec se cache une opportunité incroyable”

CTN: Tu as récemment été sélectionné parmi les meilleurs jeunes leaders africains pour participer au programme YALI, zone Afrique de l’Ouest. Peux-tu nous dire en quoi ce programme consiste et quels sont les avantages concrets que tu en tire?

JK: Ma sélection à ce programme est le résultat de ma perséverance et de mon travail sur le terrain pour impacter ma communauté. J’ai postulé à plusieurs programmes sans réponses favorables. Cela m’a encore plus motivé à continuer, car derrière un échec se cache une oppotunité incroyable. Cette fois a été la bonne. En effet, le programme YALI (Young African Leaders Initiative), est une initiative du Président Américain Barack Obama. Le programme vise à sélectionner les jeunes Leaders de l’Afrique Sub-saharienne qui, par leurs actions, impactent leurs communautés. Ce programme est sub-divisé en quatre zones en Afrique à savoir le Ghana, l’Afrique du Sud, le Kenya et le Sénégal (Dakar) et un autre nommé le ‘Mandela Washington Fellowship‘ qui se déroule aux USA. Ainsi, sur plus de 3,000 postulants au Programme ‘Yali Dakar’, seulement 100 jeunes Leaders ont été retenus pour la formation en ‘Business & Entrepreneurship’, ‘Civic Leadership’ et ‘Public Management’. Je suis admis dans la catégorie ‘Business & Entrepreneurship’. Pendant les cinq (5) semaines de formation à Dakar, nos capacités en management d’entreprise, en marketing et en Leadership seront renforcées. Nous avons aussi des mentors qui vont nous épauler dans la concrétisation de nos projets. Il y a également des avantages relationnels car lors de la formation nous rencontrons des chefs d’entreprise très influents qui, en plus de leurs conseils, nous laissent leurs contacts pour d’eventuelles collaborations. Nous aurons, après notre formation à Dakar, sept semaines de suivi intense et d’activités dans nos differents pays avec la possibilité d’accompagnement de nos projets. Des possibilités de stages pour ceux qui le souhaitent dans les institutions et des entreprises connues.

CTN: En tant que jeune leader modèle, quels conseils peux-tu donner aux jeunes africains en général et ivoiriens en particulier, qui veulent suivre ton exemple?

Je voudrais ici encourager les jeunes africains et surtout ivoiriens à faire valoir leurs potentialités en impactant leurs differentes communautés. Je sais qu’ils sont très instruits avec des talents incommensurables, mais comme le disait Herhert Spencer “le grand but de l’éducation n’est pas le savoir mais l’action”. Oui, les jeunes doivent agir et arrêter de spéculer. Il est temps qu’ils se réveillent de leur sommeil pour qu’ensemble nous puissions bâtir une Afrique vivable. Ceux qui ont des idées pour le dévéloppement de la Côte d’Ivoire ou de l’Afrique, qu’ils n’attendent pas demain. Commencez dès aujourd’hui, car comme le disait Tony Robbins “La clé du pouvoir, c’est l’action”.

CTN: Comment et où te vois-tu dans cinq ans?

JK: Je ne veux pas paraître trop prétentieux mais dans cinq ans, je me vois à la tête d’un cabinet de langue et de formation très structure, employant des dizaines de jeunes.

CTN: Un dernier mot?

JK: Je te remercie pour cette lucarne que tu m’offres pour parler de mes activités et surtout de mes ambitions pour la Côte d’Ivoire de demain que je voudrais prospère et où chaque citoyen, ivoirien ou non, se sent épanouis dans un environnement sain! Quand à toi, tu fais partie de ceux qui nous encouragent à perséverer dans nos actions. Que Dieu te bénisse, Emile!

Merci pour ton précieux temps quand je sais que tu n’en as pas beaucoup vu toutes tes activités, et surtout bon courage pour la suite!


Chez les Ivoiriens

L’humour (sans exagérer et pour paraphraser Edouard Herriot ou André Malraux), c’est la dernière chose qui restera à l’Ivoirien quand il aura tout perdu ; y compris sa paix arrachée de force par une décennie de guerre, sa tranquillité arrachée par une attaque terroriste meurtrière sur une plage bondée de gens exprimant leur joie de vivre.

C’est ce sens de l’humour qui a conduit à la création de ‘concepts’ qui, accompagnés de musique, une autre identité de ce peuple, devient une danse. C’est à croire que l’Ivoirien est condamné à vivre heureux tant il trouve en chaque situation une opportunité d’exprimer cette joie de vivre.

L’épidémie de ’Grippe aviaire’ est survenue et, pendant que d’autres pays semblaient en être fortement atteints et s’activaient à y trouver une solution, les Ivoiriens en ont fait un ‘concept’, une danse. Un matin, le type s’est levé et a chanté « Gripp’aviaire, Gripp’aviaire, Gripapa Gripapa… ». Ça l’a rendu célèbre juste un moment. Il a empoché ses sous. Les ivoiriens ont dansé. La grippe aviaire, on n’en a plus parlé. C’est fini.

Ne me prenez pas au sérieux si je dis que c’est une simple chanson/danse qui a aidé à éradiquer cette épidémie, mais ce que je dis c’est qu’elle a permis d’atténuer la psychose qu’elle a créée au sein de la population, et elle a sans doute aussi facilité le travail des autorités sanitaires du pays qui ont fini par la maîtriser.

Les Ivoiriens ont donc de l’humour et c’est cet humour qui, faisant cocktail avec l’activisme, l’originalité, la créativité des internautes ivoiriens (aussi surnommés ‘#Les200’ −suite à un discours mal prononcé par le Ministre des TIC pour désigner ceux qui s’exprimaient sur la toile ivoirienne contre le coût élevé de la vie ou plutôt mal interprété par les internautes) s’est traduit par la création d’un nouvel Hashtag : #ChezLesIvoiriens.

La particularité de cet hashtag est qu’il présente la Côte d’Ivoire de tous les jours, du citoyen Lambda, sous son aspect plutôt déjanté. #ChezLesIvoiriens, en un mot, est une ramassée des mots et expressions des ivoiriens au quotidien, leurs façons bien à eux de traduire leurs émotions, d’entretenir leurs liens sociaux… de vivre ‘leur vie d’ivoirien’.

Ne me demandez pas qui en est à l’origine, je n’en sais pas plus que vous, mais ce que je sais c’est que #ChezLesIvoiriens affole la toile. J’ai retenu ci-dessous quelques-une des expressions qui m’ont bien fait marrer.

  1. #ChezLesIvoiriens, pour dire qu’on aime bien quelqu’un, on dit « J’aime son affaire ».
  2. #ChezLesIvoiriens, quand tu invites un journaliste à une cérémonie, il te demande « c’est diémé ?». ‘Diemé’ qui vient de perdiem.
  3. #ChezLesIvoiriens, pour exprimer le pluriel, on double le mot : « Des maisons Jaune Jaune ».
  4. #ChezLesIvoiriens, quand une fille dit « il m’énerve, ça signifie généralement le contraire ».
  5. #ChezLesIvoiriens, quand une fille que tu drague te dis dans une causerie « ne fait pas tes gos-là vont me frapper oh », c’est fini tu peux rentrer tranquillement savourer ta victoire.
  6. #ChezLesIvoiriens, dire qu’une fille est ‘mal jolie’ signifie qu’elle est très belle,
  7. #ChezLesIvoiriens, quand la domestique veut aller au village, elle invente un décès.
  8. #ChezLesIvoiriens, quand quelqu’un te dit « tu cherches ma bouche », entend tu me provoque.
  9. #ChezLesIvoiriens, quand quelqu’un veut t’injurier il te dit « individu ».
  10. #ChezLesIvoiriens, pointer ne veut pas dire enfoncer la pointe, mais « draguer » ou faire des avances à une fille/femme.
  11. #ChezLesIvoiriens, le fait de pointer est dit « pointage » et celui qui pointe, « pointeur ».
  12. #ChezLesIvoiriens, « toi-même tu dis quoi» est un début de pointage.
  13. #ChezLesIvoiriens, le meilleur danseur dans l’église ça peut être le pasteur lui-même.
  14. « ChezLesIvoiriens, quand on commence une phrase par « je te respecte beaucoup hein », rassures-toi, la personne va te parler sans respect.
  15. C’est #ChezLesIvoiriens qu’un mari dit à sa femme qui dort, « réveilles-toi on va dormir ».
  16. C’est #ChezLesIvoiriens le type te dis, « j’ai entendu l’odeur ».
  17. #ChezLesIvoiriens, le surnom de la cigarette est « Fall ».
  18. #ChezLesIvoiriens, quand on dit « je suis fan de toi » ça veut dire « je suis amoureux de toi ».
  19. #ChezLesIvoiriens, quand tu as un Iphone tu deviens le photographe du quartier.
  20. …… Vous pouvez compléter la liste.

    Note : Ces Hashtag ne sont pas de moi, mais d’auteurs différents que je n’ai pas cité pour ne pas attribuer à X ce qu’aurait dit Y, puisqu’ils sont soient retweetés ou partagés (sur Facebook).


Réponse à une Cuisine en colère

Ma Chère Cuisine,

Je suis vraiment navré pour tous ces jours de souffrances morales que je t’ai fait subir ­—de façon vraiment involontaire.

Cependant, je tenais à relever quelques écarts de langage dans ta lettre. Comment oses-tu qualifier les fast food de cette ville de « vilains trucs », hein ? Tu veux donc dire qu’il est difficile pour l’étranger de s’adapter à la nourriture locale dans cette ville ? C’est quoi cette jalousie de femme enceinte qui te pousse à être si violent au point d’en vouloir tant à ta co-locatrice, la douche ? Où aurais-tu voulu que je dépose la poubelle, dans mon salon où je m’assois pour regarder le Réal éliminer Manchester City, hein ? Est-ce toi qui paie mon loyer pour me dicter ma conduite? N’est-ce pas moi qui ait donné 24,000FCFA au plombier pour réparer mon robinet et qui s’est évaporé dans la nature, hein? Je comprends ta peine mais n’oublie pas que c’est quand même moi le maître de cette maison. C’est quand même moi qui t’essuie une fois en passant. C’est quand même moi qui subis les aboiements du chien de mon voisin. Un peu d’égard, voyons ! Mais comme je vais à l’église les dimanches, je te pardonne.

Chère Cuisine,

Tu parles d’indifférence, de mépris… non, laisse-moi t’expliquer pourquoi. Après, j’espère que tu me comprendras et me pardonneras.

Premièrement, tu vois, je suis le benjamin d’une famille constituée majoritairement de femmes. Il y avait aussi ma mère, donc tu comprends que je n’avais pas besoin d’entrer en cuisine pour manger. En outre, quand bien même que Papa m’ait envoyé à l’école loin de la maison, « pour ne pas que maman et mes sœurs me «gâtent» », j’étais dans des familles d’accueils où je lavais seulement mes habits. Je faisais tout sauf cuisiner. Quelle chance aurais-je donc pu avoir pour apprendre, hein? Tu comprends ce que je veux dire ?

Deuxièmement, si je ne te pratique pas, c’est en partie la faute à mes cousins avec qui je vivais pendant mes années de FAC. Je t’explique. On louait un appartement à quatre. Chacun de nous trois devrait faire la cuisine deux jours par semaine et le quatrième, l’aîné, avait le dimanche midi et soir. Moi, j’avais le vendredi et le samedi. Crois-moi, je maudissais toujours ces deux jours. Comme j’aime faire la lessive, soit je lavais les habits d’un parmi eux qui faisait la cuisine à ma place, ou alors, j’allais acheter à manger dehors quand j’avais un peu d’argent. L’essentiel était qu’il y ait à manger, tu comprends non? Mais mon malheur est qu’il se trouvait souvent qu’aucun d’eux n’ait d’habits sales et que je sois fauché comme un rat d’église.

Un jour, le karma m’a exposé. Je n’avais d’autres choix que de cuisiner. Avec le zèle d’une célibataire de 37 ans qui vient d’avoir sa première demande en mariage, je me suis mis à la cuisine de 14h à 19h. Après avoir transpiré toute la sueur de mon corps, chanté tous les titres d’Alpha Blondy et de Nayanka Bell en passant par Lucky Dube et avec l’aide de Dieu, j’ai pu m’en sortir sain et sauf avec mon meilleur plat de riz à la sauce arachide que j’ai proposé à mes cousins en espérant recevoir les compliments du jury qu’ils constituaient. C’est plutôt à des moqueries et à des critiques acerbes que j’ai eues droit : « Emile, mais comment as-tu pu oser préparer une sauce arachide avec du rognon, du foie de bœuf, hein ? Emile, as-tu renversé toute la bouteille de sel dans ta sauce? Au fait, Emile, ce piment, c’est pour guérir un fou? Est-ce que tu voulais finir l’eau du robinet?» et tralala. De toi à moi, est-ce là une façon sainte d’encourager un cuisinier stagiaire, hein? Ces critiques ont tué mon talent de Chef et depuis j’en souffre, aujourd’hui tu en paies le prix.

Troisièmement, enfin, tu te souviens qu’il y a deux semaines j’ai voulu faire une omelette rapide pour le dîner et en voulant renverser l’œuf dans l’huile j’ai mal saisi la poêle et me suis fait brûler les doigts. La douleur à transpérer tout mon corps des cheveux aux orteils pour atteindre mon âme. Conclusion, j’ai tout laissé tomber pour me contenter d’un pot de yaourt. Tu vois que j’essaie mais toi non plus tu ne m’encourage pas.

Toutefois, afin de faire la paix, signons l’accord ci-dessous qui entre en vigueur dès sa mise en ligne :

Accord de Paix entre les Parties : Emile, Ci-après désigné « le stagiaire » et la Cuisine, Ci-après désignée « la plaignante » :

Article 1 : Le stagiaire s’engage à nettoyer régulièrement la cuisine, soit une fois par semaine;

Article 2 : Chaque partie a 3 jours dans la semaine et le dimanche est consacré à Dieu ;

Article 3 : En cas de match de Ligue de Champion, l’Article 2 ne s’applique pas au stagiaire ;

Article 4 : Afin de réduire les tâches pendant et après la préparation, le menu se limitera à des omelettes et de l’igname bouillie ou autres grillades. Pas de sauce ;

Article 5 : En cas de fatigue du stagiaire, la plaignante devra faire preuve de compréhension ;

Article 6 : Le présent Accord pourra être modifié autant de fois qu’une Constitution Africaine, par le stagiaire, s’il le juge nécessaire, et s’appliquera aussi longtemps que Faure Gnassingbé restera au pouvoir ;

Article 7 : Tout règlement de conflit émanant de l’interprétation d’un quelconque article du présent Accord devra se faire en présence des 3 autres co-locataires (le salon, la chambre et la douche) ;

Article 8 : En cas de vote, la voix du stagiaire comptera pour double ­—C’est lui qui paie le loyer.

Ont librement signés et adhèrent au présent Accord, les parties.

Ma Chère Cuisine, comme tu le vois, je ne te déteste pas. C’était juste une incompréhension que l’Accord ci-dessus, très équilibré, vient lever — au nom de la paix !

Signé ton Cher Emile

Fait à Abuja le 4 Mai 2016