
Cela fait des mois, de nombreux mois, que la crise au Nord Mali dure et perdure. La souffrance des populations dure et perdure. Excepté cette minorité connue ou inconnue à qui cette situation profite, les populations du Nord Mali se meurent. La plupart a traversé la frontière pour se réfugier dans les pays voisins. D’autres se sont plutôt repliés sur le Sud notamment dans la Capitale, Bamako. Qu’ils soient déplacés internes ou réfugiés dans d’autres pays, les Maliens du Nord, ceux du Sud et avec eux, tous les amis de ce pays, sont fatigués de cette situation qui n’a que trop duré.
Le Mali était connu pour sa fierté, son orgueil qui ne faisait pas l’objet d’une si grande présence des anciens colons, en tout cas, comparé à la Côte d’Ivoire et le Sénégal, entre autres. Mais aujourd’hui, tout devrait avoir changé. Le Mali est aujourd’hui un pays rabaissé, son peuple humilié. Tout simplement parce que le Mali, disons l’Etat malien doit son existence actuelle à la France.
Nous y sommes arrivés par le fait que des individus aux intentions voilées se soient targués d’aimer le Mali mieux que tout le reste des maliens. Cet amour bien-à-part les pousse à prendre en otage une partie de la population.
Il y a cette évidence sur laquelle je reviens chaque fois : Dans un pays, dès l’instant où un groupe de personnes se dit plus patriote que le reste, on n’est pas loin de l’affrontement, de la guerre. Ceci pour la simple et bonne raison que le patriotisme ou l’amour pour sa patrie est un sentiment naturel dont tous les citoyens d’un même pays sont dotés. Personne ne peut prétendre aimer son pays mieux que ses compatriotes. Même les étrangers qui viennent y vivre, s’ils y sont et non pas ailleurs, c’est bien entendu par instinct de patriotisme. C’est parce qu’ils aiment, eux aussi, à leurs manières, ce pays qu’ils y passent des années de leurs vies. C’est par amour pour la Côte d’Ivoire qu’un Mauritanien viendrait y vivre et non au Ghana. C’est par amour pour le Burkina qu’un Gabonais y investirait et non au Togo, qu’un Congolais quitterait Kinshasa pour Yaoundé et non Conakry etc. Ce qui fait la différence, c’est la manière de sentir ce patriotisme, de le vivre et de l’exprimer. Il est donc injuste de vouloir prouver qu’on aime son pays mieux que l’autre, qu’il soit étranger ou non et que parce qu’on estime ce pays brimé, il faut le défendre avec des armes au mépris des vies humaines.
Cette précision me semblait nécessaire. Mais ce qui motive cet article, c’est ce débat que j’ai suivi, il y a quelques semaines sur France 24 sur la question du Nord Mali. Ce débat qui opposait le Président du Collectif des élus du Nord Mali au porte parole de l’AZAWAD (Mnla) m’a permis encore une fois de comprendre le point de vue de ceux qui soutiennent que les vrais ennemis de l’Afrique sont les africains eux-mêmes.
Débat partie 1 – Opération Serval au Mali : une fois les Français partis…
Débat partie 2 – Opération Serval au Mali : une fois les Français partis…
La mine serrée, le ton sec, l’air visiblement nerveux, le porte parole de l’AZAWAD a longuement dénoncé la mauvaise gouvernance traduite par une répartition, jugeait-il, « inéquitable » des ressources publiques entre le Nord et le Sud puis a fustigé cette tendance de l’Etat à brimer la population touarègue, cela non sans pointer un doigt accusateur contre l’Occident − la France en tête − pour « avoir contribué à l’enlisement de la situation au Mali en intervenant aux côtés du Sud » avant de conclure sur un ton ferme : « Nous ne réclamons pas l’indépendance de l’AZAWAD, mais son autonomie et cela n’est pas à négocier. Nous ne quitterons pas Kidal. Nous combattrons jusqu’à notre dernier souffle de vie ».
De son côté, le porte parole des élus du Nord n’a pas fait mieux que rejeter en bloc « ces allégations de marginalisation des populations du Nord Mali ». Le fixant droit dans les yeux, il a accusé avec insistance le porte parole de l’AZAWAD et à travers lui tous les autres mouvements rebelles combattants dans cette partie du pays de tous les maux dont souffre le Mali actuel. Lesquels, selon lui, ont pour noms « le viol, le vol, la violation des droits de l’homme, l’assassinat de la démocratie, la mise en place d’une bande de narcotrafiquants ». Il leur a reproché de faire du Mali, la base arrière du terrorisme dans le monde. L’honorable s’est par la suite montré « reconnaissant » envers la France à qui il a dit « grand merci d’avoir maintenu l’existence actuelle du Mali » puis, contre toute attente et sans pudeur, l’a accusé d’avoir laissé Kidal aux mains des islamistes « par une faute technique de l’armée française » avant de conclure fermement : « il n’est pas question de parler ni d’indépendance ni d’autonomie de l’AZAWAD ».
Du mépris, que du mépris. Voici, je pense, le sentiment que, comme moi, devraient avoir eu les maliens qui ont suivi ce débat vis-à-vis de leurs deux leaders qui par leurs propos ont encore une fois humilié ce pays. S’exprimant dans un français aussi douteux que la cause même qu’ils prétendaient défendre, ils n’ont pas fait mieux que faire de grands gestes de la main sans proposer de solutions concrètes pour sortir le pays de l’enlisement.
Comment un élu de la nation peut-il accuser publiquement une armée étrangère, qui plus a sacrifié la vie de cinq de ses soldats, de n’avoir pas fait assez pour sauver son pays quand à côté dormaient paisiblement auprès de leurs épouses ceux à qui revenait la primeur de cette tâche ?
J’ai estimé qu’au-delà de constituer une humiliation odieuse du peuple malien, cela était une insulte au peuple Français et à la mémoire des soldats français tombés au combat. Quoique jugée démobilisée, l’armée malienne existait. Où étaient le capitaine Sanogo et sa cohorte quand les soldats Tchadiens et Français donnaient leurs vies pour une cause qui n’était pas forcement la leur ?
De l’autre côté, ceux qui réclamaient l’autonomie de l’AZAWAD avaient-ils consulté la population pour demander son avis puisque c’est en son nom qu’ils prétendaient agir? D’ailleurs, de quelle autonomie parlent-ils ? Celle qui leur permettra de violer des jeunes filles, d’amputer des jeunes hommes, de tuer par lapidation ou par coups de fouets des mères et des pères de familles… tout cela impunément ?
Non, le peuple malien mérite mieux que ce qu’il subit aujourd’hui par la seule faute des inconsistances et des légèretés de ses leaders. Si l’objectif de certains acteurs directement impliqués était de rabaisser le Mali, ils l’ont bien réussi. Si d’autres manœuvraient pour susciter la compassion du monde entier et attirer vers le Mali, les pluies de l’Aide internationale, ils devraient s’en réjouir. Quatre milliards d’Euros, c’est de l’argent, beaucoup d’argents à se partager. Mais le peuple malien dans sa grande majorité, lui, ne demande qu’une seule chose dont il a droit : la paix, la liberté avec, parce que le Nord mali en a marre de cette situation dont Kidal qui sert aujourd’hui de base à ces pyromanes n’y gagne que dalle !
Paix au Mali !
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