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Au fait, mon ami où habites-tu ?

Un Immeuble écroulé à Angré, Abidjan
Un immeuble écroulé à la Djibi, Angré- Abidjan
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Aujourd’hui à Abidjan, il est difficile de répondre avec précision à un vieil ami que tu rencontres après un long moment et qui te demande : « Où habites-tu mon ami ? ». Pour cause, la capitale économique de la Côte d’Ivoire flotte sur les eaux de pluie. On n’est pas si sûr de rentrer le soir et retrouver sa maison au même endroit où l’on l’a laissée en sortant le matin. Résultat : il y a une forme de nomadisme citadin qui s’est développée dans la capitale. Certains se couchent à la Riviera, se réveillent à Angré, vont au travail au Plateau et rentrent le soir à Yopougon parce que leur villa 3-pièces située au 4e étage de l’immeuble Santa Maria s’est déracinée comme un manguier sous la pression de la forte pluie pendant que, se faisant aider, ils tentaient de faire sortir leur BMW noyée dans la flaque d’eau au carrefour de l’Indenié.

A Mossikro cette nuit, une mosquée s’est écroulée sur des fidèles musulmans. Le ministre s’y est rendu à 8 heures avec une valise d’argent, généralement le montant varie entre 500 000 et 20 millions, voire plus. Le ministre, dans une tenue de philanthrope avec une mine de samaritain reconnu, tend la mallette « au représentant des parents des victimes, au nom de l’Etat de Côte d’Ivoire ». Ce dernier dans un discours laudatif sous l’effet des billets de banque, « souhaite que le ministre dure à la tête de son ministère et au nom des parents des victimes, que la pluie dure ». Le ministre-philanthrope-samaritain retourne chez lui en attendant qu’on lui annonce le lendemain qu’il y a eu un éboulement de terrain à Attécoubé 3 pour mobiliser tout l’arsenal de la RTI et s’y rendre se faisant passer pour Raoul Follereau cette fois-ci. En plus de la mallette, il y ajoute des sacs de riz et des sachets de spaghettis pour des gens qui n’ont plus de cuisine.

Qui est coupable ?

A qui la faute ? Les familles vivant dans ces zones à risque à qui on aurait demandé de déguerpir et qui n’ont pas obéi ? A l’Etat pour n’avoir pris aucune mesure préventive pour éviter ces drames de trop ? Chacun a sa réponse.

Moi je suis trop occupé à chercher à savoir pourquoi le ministre de l’Enseignement supérieur déclare publiquement que le développement ne se fera pas par les lettres et qu’on continue d’ouvrir les séries littéraires dans les lycées et collèges, on autorise des candidats, trop ignorants pour s’en rendre compte, à composer au bac en français, en philosophie dans un pays qui aspire à l’émergence à l’horizon 2020?

Je suis bien plus occupé à savoir ce que fait encore Sidy Diallo à la tête de la Fédération ivoirienne de football après ces millions de francs engloutis pour revenir du Mondial avec 3 malheureux petits points en se contentant d’« assumer ». Assumer, ça, tout le monde peut le faire et sait le faire. Mais il faut aller au bout. Moi, par exemple, j’assume cet article. Mais si la police me demande de venir répondre d’un quelconque écart de langage, je vais disparaître. Je vais jurer que c’est un arnaqueur qui a frauduleusement accédé à mon blog pour y poster ce billet. Assumer ne veut pas forcément dire qu’on reconnaît sa culpabilité. Mon ami Grégoire va voler chez le voisin, son père assume, mais cela ne veut pas dire que c’est lui le père qui a volé. C’est juste parce que c’est son fils.

Toutefois, dans le cas ici, le coupable c’est lui, Sidy. Les Ivoiriens ont crié, fait signer des pétitions pour réclamer le départ, en vain, de SON stagiaire à la tête de leur équipe nationale. Que va faire un agneau à un rendez-vous de démonstration de force des loups ? Il s’est obstiné nous jurant que le stagiaire nous ramènerait la coupe du monde et même qu’après nous irions chercher la coupe d’Europe. Ils étaient près du but, le stagiaire a fait sortir CEUX QU’IL NE FALLAIT PAS pour faire entrer CEUX QU’IL NE FALLAIT PAS. L’un d’eux a fait CE QU’IL NE FALLAIT PAS, puis le chaos. Qui est coupable ?

On dormait donc à tour de rôle

Je suis arrivé au bureau ce matin somnolent parce que j’ai passé toute la nuit à classer et reclasser mes valises et autres affaires du fait de la pluie. Toute ma chambre, je veux dire notre chambre, mes frères et moi, coulait. Et quand la pluie a cessé, l’espace qui restait sec où dormir ne suffisait pas pour nous tous. On dormait donc à tour de rôle. A mon tour, j’ai jeté un coup d’œil à ma montre il était déjà 6 h15, il fallait prendre mon bain et aller au travail. Cela par exemple, j’assume. Sinon je serais allé m’immoler devant la porte du maire de Yopougon pour qu’il fasse détruire cet immeuble construit, au-dessus de ma résidence cinq étoiles, la résidence Bela, dans un quartier inapproprié à ce type de construction servant de chambre de passe pour ces prostituées et autres hommes de nuit et un nid de malfrats agressant chaque nuit les habitants du quartier. Tout le monde peut donc assumer, mais ceci n’empêche pas qu’il faille prendre les décisions qui s’imposent et apporter des solutions non pas curatives, mais préventives.

De l’aveu du directeur général de la météorologie, la pluie continuera jusqu’au plus tôt à la fin du mois de juillet. C’est donc dire qu’il y a un long mois devant nous et Dieu seul sait combien de personnes pourraient en subir les conséquences déjà trop lourdes. L’année dernière ce ne fut pas si différent. Nous avions assisté aux mêmes drames que cette année. Au-delà donc des millions pour « témoigner la compassion du gouvernement aux familles des victimes », quelles solutions envisagez-vous, Messieurs du gouvernement, pour éviter pareilles situations l’année prochaine puisque l’année 2015 comporte aussi un mois de juin, de juillet aussi ? Voici la question à se poser. S’il n’y a pas de réponse, je vous propose alors de former d’avantage de maîtres-nageurs et d’experts en construction de maisons sur pilotis parce que la fin du monde n’est pas pour demain et il pleut toujours, peut-être pas chez vous mais chez nous, Oui.

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Auteur·e

bela

Commentaires

Emile Bela
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Vos mots pour le dire ici!

nathy
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intéressant....

Julien
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Joli billet, Emile !
Je compatis pour ce que vivent les ivoiriens en ces moments. Mais je déplore ces comportement des politiques qui n'apportent concrêtement pas grande chose à la recherche de solutions aux problèmes, quand bien même ils savent autant ou même mieux que quiconque, les vrais actes à poser.

Emile Bela
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Salut Julien,

le drame c'est exactement ce que tu viens d'évoquer. Rien de préventif. Tout n'est que curatif.
Abientôt pour un nouveau billet.

Amitiés

Olivier Houngnonnvi
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Bel article, mais je suis resté sur ma faim

Emile Bela
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Salut Olivier,
Ah oui? ta faim c'était quoi?
j'ai encore un plat chaud qui vient bientôt c'est sûr qu'après consommation tu seras rassasié et tu reviendras ici chaque fois que tu auras faim. :)
Amitiés