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Lettre ouverte à la Sotra : n’obstruez pas la route de l’émergence !

Credit Photo: www.acturoutes.info
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Monsieur le Directeur Général,

Votre titre de Directeur Général de la Société de transport Abidjanais −Sotra− fait de vous une autorité publique et comme telle vous méritez mon respect sans réserve. Ce respect exige de ma part un langage poli et courtois dépourvu de tout propos injurieux, mais aussi franc et sincère. Vous voudrez bien lire la présente comme la lettre d’un citoyen d’un Etat que vous servez et qui vous paie grâce aux cotisations de ses citoyens y compris moi. Mais en retour ces citoyens subissent à n’en plus pouvoir les défaillances de vos services censés leur profiter.

Ma décision de vous écrire fait suite aux récurrents dommages que votre entreprise nous fait subir, des milliers d’autres Abidjanais et moi-même, chaque jour sur le chemin de notre travail, pour certains, de l’école  ou pour n’importe quelle autre destination, pour d’autres. Peut-être qu’avant moi vous avez enregistré des plaintes liées à la qualité de vos services. Peut-être aussi que vos agents commis à la tâche, si vous en disposez, ne vous relayent pas les plaintes récurrentes des Abidjanais, ce qui justifierait que ces pratiques qui pourrissent la vie de milliers de personnes durent et perdurent. Peut-être, enfin, que vous savez tout, mais vous vous sentez impuissant, ce qui serait bien triste. Dans un cas comme dans l’autre, permettez-moi, Monsieur le Directeur, d’attirer votre attention sur les souffrances déjà trop lourdes à supporter que vous et vos services infligez au quotidien aux Ivoiriens sur la route de l’émergence.

L’objet de ces souffrances est lié aux pannes intempestives de vos bus sur les différentes lignes. Etudiant, j’ai subi directement et impuissant cet affreux traitement. Pourtant, je payais régulièrement ma carte de bus ou à défaut mon ticket. Travailleur, je me suis juré, s’il le faut, de consacrer même la moitié de mon maigre salaire à emprunter tout sauf le bus pour éviter tout cela. Mais là non plus, je n’échappe pas aux dommages causés par vos services.

Premièrement, les pannes récurrentes de vos bus en circulation constituent une forme indirecte d’arnaque. Je vous explique. Le bus 11 quitte son quai de la Gare Nord d’Adjame pour son terminus à Koumassi. Il passe par la Liberté puis emprunte le boulevard des Martys pour regagner Treichville, puis Marcory avant Koumassi. Au niveau du café de Rome, il ralentit puis avant d’aborder le virage pour emprunter le pont de Gaulle, s’arrête en plein milieu de la voie. Le conducteur appelle le service de dépannage et sort son journal de SuperSport sous son siège pour lire les commentaires des journalistes sur la débâcle du Bayern face au Real de Madrid. Cela sans se soucier des passagers qu’il laisse à l’abandon. Il ne rembourse pas non plus aux autres ce qu’ils ont payé. Ainsi fonctionnent vos services et vous obligez ceux qui n’avaient que 200 francs pour se rendre là où ils allaient à faire le reste du trajet à pied. Avez-vous un instant imaginé qu’il y a des Ivoiriens qui, par votre faute, marchent d’Adjamé à Treichville faute d’argent? En effet, il ne leur reste aucun sou après avoir payé leur ticket. Savez-vous qu’il y a des dockers ou d’autres contractuels du Port autonome qui ont perdu leur emploi pour être arrivés en retard au service. Et cela pour avoir marché jusqu’à Vridi simplement parce que le bus 19 les a laissés en plein chemin ? Ces tickets sont certes valides, à quelques exceptions près, pour d’autres bus de la même ligne −seulement, mais encore faut-il qu’il y ait un bus de la même ligne qui arrive juste après et surtout qu’il y ait de la place pour que ces infortunés passagers y embarquent. Pourquoi en cas de panne d’un de vos véhicules en circulation, ne restituez-vous pas aux passagers leurs sous ou a défaut leur dépêcher immédiatement un autre bus ?

Deuxièmement, et c’est ce qui justifie ce billet, les pannes de vos bus en circulation qui sont obligés de stationner en pleine chaussée créent un embouteillage monstre préjudiciable, au-delà des passagers qui y sont, aux autres usagers de la route dont moi. J’habite Yopougon et travaille à Cocody. Chaque matin, c’est à un véritable jeu de loterie que je me livre. Je me dis, si je sors de la maison à 7 heures et que j’ai le Gbaka à 7 h15, mises à part les pratiques de mauvaise conduite des chauffeurs de Wôrô Wôrô et de Gbaka et les tentatives très sélectives (parce que les véhicules en provenance des 2 plateaux une fois au Carrefour Saint-Jacques ont plus de priorité que ceux en provenance d’Adjamé) des agents de circulation, je peux arriver au bureau à 8 heures. Cependant, si je sors à la même heure et qu’un bus de la Sotra −encore une fois, est tombé en panne sur l’autoroute au niveau du Banco et stationné en plein milieu de la chaussée − comme toujours, il est clair que le retard est inévitable. Pour être à l’abri donc, je préfère sortir de la maison à 5 h 30 du matin pour être au bureau à 8 heures rien que pour faire un trajet de seulement 45 minutes maximum en temps réel. Voici ce que vous faites de moi. Mais même là, tout n’est pas gagné. Il y a deux jours, j’ai failli me faire renvoyer par mon patron pour retard alors que je suis sorti de la maison à 5 h15 pour lui soumettre à 8 heures un rapport capital pour l’entreprise. Ceci  parce qu’au niveau de la station Shell au Banco un de vos bus est resté planqué créant ainsi un embouteillage jusqu’à l’Institut des aveugles. Ce matin encore, à cause d’un bus nous avons été contraints d’emprunter le trottoir manquant de justesse de nous retrouver dans le ravin. Je me rappelle ce jour où dans un taxi, le chauffeur m’expliquait que l’accident meurtrier qui venait de se produire était dû d’abord au bus qui était stationné en pleine chaussée. Un véhicule que voulaient dévier deux chauffeurs qui ne pouvaient plus attendre et qui ont fini par se percuter. Voici des exemples de dégâts que vos services créent et dont en sont victimes des contribuables qui vont le matin au travail pour cotiser afin que  cet argent serve à vous payer.

C’est donc dire que vous êtes tout aussi indirectement −dans les cas sus-évoqués− et directement −dans les cas des bus fous qui font des sorties de route− responsables des nombreux cas d’accidents. Les campagnes de sensibilisation de l’Office de sécurité routière −Oser− devraient, à mon avis, s’étendre à vous, puisqu’en améliorant la qualité de vos services vous contribuerez à réduire le taux d’accidents et à sauver des vies.

De votre comfort zone, je vous invite à penser aux Abidjanais qui souffrent directement ou indirectement de la qualité approximative de vos services. Retenez qu’il est de votre devoir de bien faire votre travail pour éviter que d’autres paient pour ce qu’ils n’ont pas fait. Non, monsieur le Directeur Général, vous n’avez pas le droit de nous faire payer pour vos défaillances. Réfléchissez-y, et vite! Parce que l’émergence c’est en 2020 et nous sommes sur la route. Ne l’obstruez pas.

 

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Auteur·e

bela

Commentaires

Emile Bela
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Vos mots pour le dire ici!

A.B. Ladji Coulibaly
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Moi je fais comme daouda, je roule en Gbaka....Bien dit tout de meme

De Rocher Chembessi
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C'est toi qui a vu juste