Quand deux chefs se croisent dans un combat singulier, le spectacle devient hors du commun. Voici comment l’on pourrait résumer le très attendu derby ouest africain de ce samedi 13 Octobre 2012 comptant pour les éliminatoires de la coupe d’Afrique des Nations 2013. A l’Affiche, Côte d’Ivoire-Sénégal, deux pays frères mais plus qu’adversaires disons des « ennemis » pour la circonstance. L’éléphant de Côte d’Ivoire (maître de la forêt) devrait rencontrer le lion de la Teranga (roi de la forêt). Mon ami Coulibaly Moustapha me disait un jour que “dans une collision de deux grumiers, le vélo n’a pas sa place”. Et les supporters ivoiriens l’on appris à leur dépend dans un face-à-face Côte d’Ivoire-Sénégal.
En attendant le match, les défis
L’un des aspects qui rendent le football assez intéressant n’est pas seulement le suspens des 90 minutes de jeu, mais les défis que les supporters se lancent mutuellement vantant, chaque camp, les mérites de son équipe. Et cette affiche Côte d’Ivoire-Sénégal n’aura pas fait l’exception. On pourrait dire qu’il existait un excès énorme de confiance chez chacun des supporters des deux camps. D’un côté, des ivoiriens sûr de leur équipe nationale n’ont pas manqué d’expressions « ivoiriennes » pour vanter ses qualités. Sur son mûr Facebook, mon ami Mathieu Rodrigue traduit cette confiance par cette expression bien ivoirienne « Yeux connait viande qui est dure, c’est Lion qui fait exprès 🙂 » ; Kamenan de son côté esquisse quelques pas de danse au rythme de cette musique bien connue des ivoiriens « ♫ ♫ C’est comment commennnnnnt …Vooiila Liiion , il est sur terrain…devant Elephant » ♫ ♫ ».
Jurant sur la jeunesse de son équipe, la ténacité des attaquants, la détermination collective d’aller jusqu’au bout pour triompher, Mame More, mon ami et frère Sénégalais m’a offert ses services pour faciliter ma demande de nationalité sénégalaise, il m’a même offert une femme sénégalaise sachant que je les aime bien vu leur beauté parfois envoutante. Quand je les vois je me dis que si Jacob Zuma avait été Sénégalais, il aurait 365 femmes, c’est-à-dire une femme par jour. Le comble, Mame a posté sur mon Mur Facebook cette photo d’un lion débout devant un éléphant couché, sans doute qu’il venait de tuer en ignorant que la viande d’éléphant n’est pas aussi facilement commestible.
Didier Drogba était là, la victoire aussi
Un match de football de l’équipe nationale de Côte d’Ivoire sans un but de Drogba, c’est comme une journée entière à Conakry sans coupure d’électricité, ça n’existe presque pas ; c’est surtout comme imaginer Paul Biya quitter la Suisse pour gouverner le Cameroun à partir du Cameroun, c’est un rêve de camerounais qui est loin de la réalité. Les lions n’auront donc pas compris cela et ce qui devrait arriver arriva. Deux buts à zéro, c’est-à-dire un premier but, puis un deuxième… puis le chaos ! « Tout cà là c’est DROGBA DIDIER, ce monsieur est dangereux. Tu as mis 2 buts voilà palabre. Tu es content maintenant non 😀 » écrit Mathieu Rodrigue sur son mur Facebook sur un ton de joie plutôt emprunt de moquerie.
De leur côté, les Sénégalais n’imaginaient pas cette CAN sans les lions de la Teranga. C’est comme si on organisait une soirée à la rue zone 4C d’Abidjan Marcory sans la présence de prostituée Ivoiriennes, Marocaines, Ghanéennes et…, c’est surtout comme un sommet de la Francophonie sans la présence d’un Chef d’Etat Français ; peu importe son discours. Tant pis pour ceux qui s’exibéront après. Voir leur équipe nationale sortir de la compétition était donc inacceptable et les Sénégalais l’ont bien montré, sauf que c’était de la plus mauvaise des manières. Le spectacle était désolant. Sur le terrain, l’éléphant a confirmé qu’il était le maître, mais dans les tribunes, le lion a prouvé qu’il demeure le roi. J’ai vu des jeunes ivoiriens sortir des vestiaires comme un troupeau d’antilopes recevant la visite non souhaitée d’un lion.
C’était le sauve qui peut! Et à cet exercice, la force seule ne suffisait pas, il fallait un peu plus de rapidité pour échapper au gourdin de Fall, à la pierre de Malick, au coup de poing de Dieng ou encore à la chaussure de Diouf tout ceci sous les injures grossières de Kady Sow. Même le Ministre des sports Sénégalais, Malick Gakou, n’aura pas été épargné par la pierre lancé directement sur son crâne par Mata Sy. Digbeu, ce jeune Ivoirien qui, pour fuir la chasse aux pro-Gbagbo par les forces pro-Ouattara au lendemain de la guerre en Côte d’Ivoire, a trouvé refuge au Sénégal s’est retrouvé au mauvais endroit ce jour là. Depuis ma chambre devant ma télé, j’ai entendu le bruit assourdissant de la paume de Niagne déposée sur la joue droite de Digbeu. J’ai parié sur le refus de Faure Gnasimgbe de renoncer à un prochain mandat à la tête du Togo que s’il parvenait à sortir d’une semaine de coma, il préférerait rentrer à Abidjan et affronter la soldatesque de Ouattara.
Depuis Kinshassa où il se trouvait pour assister au 14è Sommet de la Francophonie, le Président Sénégalais a fait une déclaration “condamnant très fortement” ces pratiques et a présenté les excuses du peuple sénégalais au peuple ivoirien. De son côté, l’état de Côte d’Ivoire par son ministre des Sports Légré Philippe a affirmé qu’“Il faut mettre ces incidents sur le compte de la passion. Nous n’en tenons pas rigueur aux autorités sénégalaises qui ont mis en œuvre tous les moyens et pris en charge les supporters blessés’’. Cela s’appelle le « fair-play », juste bon pour la paix entre deux pays frères.
Ces pratiques-là qui nous mettent en retard
De tout ceci, ce qui m’a laissé perplexe ce sont les spéculations sur les pratiques mystiques auxquelles se sont données les Sénégalais en confiant leur sort aux marabouts. L’ancien capitaine des lions de la Teranga, El Hadj Diouf (non sélectionné pour ce match), a revelé qu’“à Abidjan les lions avaient dormi avec des melons et que 3 chèvres auraient été tuées contre 4 au Sénégal pour faire gagner les lions”. D’autres déclarations estiment qu’une centaine de marabouts auraient été mobilisés pour la circonstance. Sans doute que la Côte d’Ivoire aussi y est allé de son côté, puisque c’est souvent ainsi en Afrique.
Le Benin est dit l’un des pays d’Afrique de l’Ouest réputé en matière de mysticisme, mais de mémoire, il n’a jamais remporté une finale de coupe d’Afrique. Il devrait donc y avoir question à se poser. Jusqu’à quand comprendront les africains que les croyances parfois douteuses et les pratiques très souvent lugubres et loufoques qui les accompagnent nous mettent en retard sur le reste du monde !? Quand comprendront ceux qui croient que se payer les services d’un marabout ou d’un prêtre exotérique ferait gagner une coupe plutôt que d’investir dans l’encadrement technique des joueurs et les infrastructures sportives ? Quand comprendront tous que le retard tant décrié de l’Afrique ne réside pas moins dans ces pratiques que dans le néo-colonialisme ? Chacun a sa réponse.
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